Alain GIRESSE
"On peut parler de traumatisme. Autant d'agressivité, de violence, ça interpelle. Surtout que j'ai vu des gens que je connaissais me menacer... M'imaginer retourner sur ce banc, c'est dur. Pour coacher, il faut avoir les idées claires et ne pas penser à autre chose", affirme à l'AFP +Gigi+.
"Je suis tombé de haut. Tout le travail et le temps investi ici ne m'ont pas donné le moindre crédit", poursuit-il, assurant ne pas comprendre qu'une défaite lors d'une compétition mineure ait pu générer une telle réaction.
"Le vrai défi, c'était la CAN-2010, préparer la CAN-2012 (organisée par le Gabon avec la Guinée équatoriale). Là (samedi), c'était une équipe de jeunes que je préparais pour l'avenir", explique l'ancien milieu de l'équipe de France, qui entraînait le Gabon depuis mars 2006.
"Honnêtement: le Gabon n'a pas les moyens d'avoir des équipes à tous les niveaux. Perdre contre le Cameroun avec une équipe de jeunes, c'est logique. Un million d'habitants, ce n'est pas 20 millions, 40 millions. Il n'y pas de réservoir de joueurs", ajoute le Français, qui préparait un groupe de haut niveau pour les éliminatoires de la CAN-2010 avec les joueurs expatriés.
En deux ans à la tête des Panthères, Giresse n'avait pas ménagé ses efforts.
Il avait recensé les joueurs à l'étranger, repéré de nouveaux talents, géré la carrière d'autres pour les faire partir vers l'Europe et les championnats professionnels, fait naturaliser deux joueurs - l'Ivoirien Moïse Brou Apanga et le Congolais Guy Tchingoma, décédé début février - pour renforcer l'équipe, et surtout négocié avec les "vedettes" leur retour en sélection nationale.
De nombreux joueurs, dont Daniel Cousin, avaient tiré un trait sur l'équipe nationale avant de revenir sur leur décision avec l'arrivée de Giresse aux commandes.
"J'ai contribué à redonner une âme aux Panthères", précise le coach qui s'occupait aussi de nombreux détails techniques allant de la convocation des joueurs aux voyages. L'entraîneur devait également faire face à l'inertie de la fédération gabonaise qui ne lui avait pas fait signer de nouveau contrat et n'avait pas respecté tous les engagements du précédent.
"On me dit: +l'Afrique, c'est dur d'y travailler+. Ce côté-là, je l'avais maîtrisé", souligne Giresse, qui avant le Gabon avait entraîné la Géorgie et le FAR de Rabat.
Depuis l'annonce de son départ, dimanche, le téléphone de Giresse ne cesse de sonner. De nombreux internationaux gabonais lui demandent de revenir sur sa décision, d'autres menacent de ne plus rejouer.
Il s'occupe de remettre un cadeau à la veuve de Guy Tchingoma et continue également à tenter de résoudre des problèmes organisationnels du prochain match du Gabon le 31 mai contre le Lesotho pour le début de la campagne de qualification pour le Mondial-2010.
"J'ai un sentiment d'inachevé. Sur le plan humain, je me suis enrichi. J'ai rencontré plein de gens avec qui j'ai partagé des choses fortes, j'ai pu me rendre compte de comment on vit dans des pays différents, j'ai vu une culture différente... Des liens se sont tissés. J'ai plus apporté à ces joueurs que Rijkaard aux joueurs de Barcelone, mais je ne remporterai pas de Coupe d'Europe avec ceux-là...", conclut-il visiblement ému. "Ma décision n'est pas une décision de plaisir".
Issouf Sanogo AFP ¦ Alain Giresse à Abidjan le 8 octobre 2006.
© 2008 AFP
20Minutes.fr avec AFP, éditions du 19/05/2008 - 21h17
dernière mise à jour : 19/05/2008 - 21h17